3.4. Mettre en place des parcours d'apprentissage flexibles

Soumis par uil_maintainer le lun 07/11/2022 - 10:27

Étant donné que l'apprentissage tout au long de la vie englobe un large éventail de possibilités d'apprentissage, les options politiques peuvent porter sur plus d'une modalité, autrement dit, sur toute combinaison de modalités d'apprentissage formel, non formel ou informel. Les interventions visant à promouvoir la flexibilité, telles que les parcours d'apprentissage flexibles, permettent aux apprenants d'emprunter des passerelles entre l'éducation formelle et non formelle, la formation et l'emploi, ou en leur sein.

Le modèle présenté à la figure 3.1 détaille et classifie les différentes caractéristiques de l'ATLV pouvant influencer sa mise en œuvre. En exposant l'ensemble du spectre de l'apprentissage à travers les différents groupes d'âge, niveaux d'éducation, modalités, sphères, espaces et objectifs, il donne une représentation visuelle des cinq éléments clés de la conception de l'ATLV de l'UNESCO, tels que présentés au début du chapitre 1.

Figure 3.1. Vue d'ensemble des possibilités d'apprentissage tout au long de la vie

Vue d'esemble des possibilites d'apprentissag tout au long de la vie

Source : UNESCO, 2016a

Le modèle ci-dessus indique les points de convergence entre les niveaux, les interventions possibles et les parties prenantes impliquées, ainsi que d'autres facteurs importants pour le processus de mise en œuvre.

Pour garantir que les besoins de tous les apprenants sont satisfaits, le Programme Éducation 2030 promeut une offre éducative flexible et centrée sur l'apprenant qui l'encourage à emprunter divers parcours d'apprentissage. L'ODD 4 enjoint les pays à « assurer l’accès de tous à une éducation de qualité, sur un pied d’égalité, et promouvoir les possibilités d’apprentissage tout au long de la vie » (ONU, 2015). Cette vision reconnaît l'importance d'offrir des possibilités d'apprentissage flexibles aux personnes de tous âges. Par « parcours d'apprentissage », on entend la manière dont nous pilotons et séquençons notre apprentissage, le développement de nos compétences, notre éducation et notre formation pour atteindre un niveau de maîtrise donnant lieu à une certification complète ou partielle dans le cadre professionnel ou académique (Lotz-Sisitka et Ramsarup, 2017). Ces parcours sont nombreux, multiformes et par nature propres à chaque individu. La mise en place d'un parcours d'apprentissage fluide est une tâche complexe, tributaire d'un certain nombre de systèmes : le système scolaire, l'orientation professionnelle, les possibilités post-scolaires, les possibilités de formation, l'apprentissage sur le lieu de travail et l'expérience professionnelle, ainsi que le système formel d'acquisition de compétences.

La mise en œuvre de parcours d'apprentissage flexibles est donc un processus complexe, influencé par un certain nombre de facteurs au niveau du pays, des établissements et même des individus. Au niveau des politiques, l'expression « parcours flexibles d'apprentissage » se réfère à la possibilité pour les apprenants de passer d'une étape et d'un programme de l'apprentissage formel et non formel à l'autre, tout en reconnaissant l'importance de l'apprentissage informel. Elle illustre aussi la complexité croissante du paysage de l'apprentissage, les prestataires de services éducatifs passant de titres et de certifications très exigeants (en termes de temps et de ressources) à des macro-titres (qualifications sanctionnant le plus souvent une formation générale et pouvant être attestées par un diplôme ou un certificat) et à des micro-certificats (également appelés « diplômes alternatifs », « badges numériques », « micro-titres », etc.), même si le terme recouvre à la fois les activités d'apprentissage menant à un certificat et le certificat lui-même (Commission européenne, 2020). De façon générale, une combinaison adéquate de politiques et d'instruments de pilotage est nécessaire pour créer un environnement favorable aux parcours d'apprentissage flexibles. Ces systèmes holistiques devraient se composer de « modules », essentiels à l'opérationnalisation de l'ATLV et répondant aux besoins des différents groupes d'apprenants, y compris les plus défavorisés.

Les parcours d'apprentissage reposent sur un principe d'« articulation », que l'on peut définir comme un ensemble de « relations horizontales entre les différents parcours d’apprentissage et [de] relations verticales lors de la transition d’un niveau à l’autre » (Hoppers, 2009). Ce principe est essentiel à la mise en place d'un système intégré de parcours flexibles. L'articulation crée des « passerelles » et des « échelles » qui permettent aux personnes de progresser dans le système conformément à leurs besoins et à leur mode de vie (qui évoluent). Elle peut être visualisée dans les cadres nationaux de qualifications, ainsi que dans les mécanismes de reconnaissance, de validation et d'accréditation des acquis de l'apprentissage non formel et informel (RVA).

Plus précisément, on peut décomposer l'articulation en trois catégories distinctes : systémique, spécifique et individuelle. Au niveau systémique, l'articulation consiste à relier les qualifications existantes, les fonctions occupées et les programmes d'apprentissage sur le lieu de travail (ou autres) entre les différents systèmes éducatifs nationaux et en leur sein. Pour que ces cadres systémiques deviennent opérationnels, il faut disposer de mécanismes d'articulation spécifiques, tels que les cadres de RVA, les systèmes d'accumulation et de transfert de crédits (CAT) et les protocoles d'accord, entre autres dispositifs interinstitutionnels. Au niveau individuel, l'articulation comprend diverses formes de soutien à l'apprenant, telles que le soutien apporté aux parcours travail-formation sous forme de conseils de carrière, d'offres d'apprentissage et d'enseignement flexibles, ainsi qu'un éventail de programmes et de structures d'appui.

En favorisant les possibilités de scolarisation de la deuxième chance et les programmes d'équivalence, les parcours d'apprentissage flexibles garantissent l'ouverture, l'inclusion et la flexibilité du système éducatif, permettant à l'apprenant de progresser sans se retrouver dans une impasse. Comme indiqué plus haut, les parcours d'apprentissage flexibles peuvent être définis dans les cadres nationaux (et régionaux) de qualifications ainsi que dans les réglementations et les mécanismes de RVA. Ils sont la pierre angulaire de l'apprentissage tout au long de la vie : en facilitant l'interconnexion des initiatives entre les modalités d'apprentissage formel, non formel et informel, ils permettent aux systèmes d'apprentissage d'être plus complets, et donc mieux à même de répondre aux besoins des apprenants.

3.4.1. Cadres nationaux et régionaux de qualifications

Au 21e siècle, la mondialisation, les avancées technologiques, les migrations et d'autres tendances affectant le monde qui nous entoure modifient les relations entre l'éducation, la formation et le travail et les complexifient davantage. Face à cette situation, des cadres nationaux de qualifications (CNQ), qui classent les qualifications par niveau en fonction des résultats d'apprentissage, ont été élaborés à l'échelle mondiale. Cette classification rend compte du contenu et du profil des qualifications, c'est-à-dire ce que le détenteur d'un certificat ou d'un diplôme est censé savoir, comprendre et appliquer. L'approche fondée sur les acquis de l'apprentissage garantit également que les sous-systèmes d'éducation et de formation sont ouverts les uns aux autres : cela permet aux individus de passer plus facilement d'un établissement ou d'un secteur d'éducation et de formation à un autre (Cedefop et al., 2017).

Il existe des CNQ dans tous les pays du monde, quels que soient leur niveau de développement et leur puissance économique. La plupart du temps, ces CNQ ne se contentent pas de classer les qualifications : ils supposent invariablement l'existence d'une vision qui redéfinit la manière dont celles-ci sont liées entre elles et dont elles sont appliquées et valorisées au sein de la société. Les cadres régionaux de qualifications (CRQ) sont des équivalents régionaux des CNQ que l'on trouve dans la région Asie-Pacifique, en Europe, dans les Caraïbes et en Afrique. En fournissant un cadre général de classification des qualifications, les CRQ simplifient la mise en relation des qualifications entre les pays.

Le nombre de CNQ a augmenté rapidement. Le Répertoire mondial des cadres régionaux et nationaux de qualifications en offre une vue d'ensemble au niveau national et régional (Cedefop et al., 2019). Ce rapport mondial confirmait en 2017 que « plus de 150 pays dans le monde ont élaboré et mis en œuvre des cadres de qualifications » (Cedefop et al., 2017, p. 8), et, en 2019, que « le nombre de cadres, nationaux et régionaux, reste stable, tandis que la mise en œuvre de la plupart d'entre eux s'est approfondie et élargie depuis 2017 » (Cedefop et al., 2019, p. 9). À l'origine de ces cadres se trouve la perception de changements fondamentaux dans l'économie mondiale, et de leurs répercussions sur la division traditionnelle entre éducation et formation et la reconnaissance formelle de l'expérience professionnelle et de l'expérience de vie. Ces points de vue rejoignaient ceux des entreprises et des gouvernements, qui voyaient dans les cadres de qualifications un moyen d'améliorer la pertinence de l'éducation pour le monde du travail et un mécanisme de pilotage permettant à l'État d'atteindre des objectifs sociaux tels que la réforme éducative ou l'égalité scolaire.

Malgré le fait que ce mouvement ait été politiquement relativement uniforme et que les CNQ partagent par conséquent des similitudes au niveau mondial, on peut en distinguer différents types en analysant deux critères : les objectifs et le champ d'application. En fonction des objectifs poursuivis, les CNQ peuvent être rangés dans les catégories suivantes (ou dans une catégorie hybride), telles que définies par Raffe (2013) :

  • le cadre communicationnel : il a pour principal objectif d'améliorer la transparence du système existant et de le rendre plus cohérent en identifiant des voies possibles de progression de l'apprentissage sans tenter directement de modifier le système lui-même ;
  • le cadre transformateur : à l'autre extrémité du spectre, ce type de CNQ aspire à instaurer un nouveau système de qualifications en imaginant comment les choses devraient être, plutôt que comment elles sont, en vue de faire évoluer le système existant grâce à une conception plus stricte, plus centralisée et basée sur les résultats ;
  • le cadre réformateur : ce type de CNQ se situe quelque part entre les deux précédents. Il prône la modification du système de qualifications existant, par exemple en renforçant la réglementation, en améliorant la cohérence des normes et/ou en comblant les lacunes existantes dans l'offre de formation.

 

On peut aussi différencier les CNQ en fonction de leur champ d'application. Beaucoup sont des « cadres exhaustifs », c'est-à-dire qu'ils englobent les qualifications de toutes les composantes des secteurs de l'éducation et de la formation d'un pays et cherchent souvent à intégrer toute une série de sous-cadres, même s'ils ont été différemment conçus (ibid.).

D'autres CNQ sont au contraire « non exhaustifs » et ne concernent qu'un seul sous-secteur de l'éducation et/ou de la formation du pays. C'est le cas au Ghana, dont le Cadre national de qualifications pour l'EFTP (NTVETQF) est le seul CNQ et, comme son nom l'indique, ne couvre que le sous-secteur de l'EFTP. Un champ d'application limité n'empêche toutefois pas un CNQ de prendre en compte les résultats de l'apprentissage non formel et informel : le deuxième volume de l'édition 2017 du Répertoire mondial des cadres régionaux et nationaux de qualification (Cedefop et al., 2017a) indique que le NTVETQF du Ghana soutient la « validation de l'apprentissage informel et non formel » et favorise « l'accès à l'apprentissage tout au long de la vie pour tous, notamment ceux qui travaillent dans l'économie informelle » (ibid., p. 225).

Encadré 3.11. L'ATLV en pratique

Le cadre national de qualifications pour l'EFTP (NTVETQF) du Ghana

Le cadre national de qualifications du Ghana a été élaboré en 2012 pour couvrir l'enseignement et la formation techniques et professionnels (EFTP) et concerne donc à la fois le secteur de l'éducation et le marché de l'emploi du pays. Il a été conçu à la fois pour identifier les qualifications disponibles dans le pays et enclencher un processus de réforme de l'éducation et de l'économie. Le NTVETQF poursuit les objectifs suivants :

  • réunir l'ensemble des compétences professionnelles obtenues après l'éducation de base au sein d'un cadre unifié de qualifications ;
  • faciliter l'accès des personnes exerçant des professions techniques et professionnelles à une éducation et à une formation complémentaires ;
  • améliorer la qualité des produits et des services en garantissant des normes de pratique uniformes dans les métiers et les professions ;
  • promouvoir l'accès à l'apprentissage tout au long de la vie pour tous, en particulier pour les travailleurs de l'économie informelle.

Sources : UIL, n.d.; Mikulec et al., 2020

Parmi les trois modalités d'apprentissage (formel, non formel et informel) examinées dans le présent manuel, le plus orienté vers la certification et l'attribution de qualifications est l'apprentissage formel. Ces dernières années, les qualifications issues de l'apprentissage formel ont été systématiquement classées et harmonisées dans tous les pays par le biais des CNQ. Cela a son utilité pour les apprenants qui participent à des programmes formels ou qui les ont achevés et qui recherchent de nouvelles possibilités d'apprentissage. Cependant, l'objectif premier d'un CNQ est de faciliter les processus de transition entre les différentes modalités et les différents programmes d'apprentissage. Un défi majeur pour la formulation et la réforme en cours des CNQ dans le monde est donc l'intégration des qualifications ou des titres pouvant être acquis, au moins dans une certaine mesure, par l'apprentissage non formel et informel. Pour y parvenir, autrement dit, pour que cet apprentissage soit rendu visible et finalement validé et accrédité, il faut que les résultats de l'apprentissage non formel et informel soient reconnus.

3.4.2. Reconnaissance, validation et accréditation des résultats d'apprentissage

La reconnaissance, la validation et l'accréditation des résultats de l'apprentissage non formel et informel (RVA) est un des piliers de toute politique d'apprentissage tout au long de la vie. Les lignes directrices de l'UNESCO sur la RVA la définissent comme une « pratique qui rend visible et valorise toute la gamme des compétences (connaissances, aptitudes et attitudes) qu'un individu acquiert dans différents contextes et de différentes manières au cours de sa vie », ce qui peut donner lieu à la reconnaissance de leur valeur dans la société (UIL, 2012, p. 8). Elle comprend trois éléments principaux :

  • la reconnaissance, qui consiste à reconnaître formellement les acquis de l'apprentissage et/ou les compétences, et peut donner lieu à la reconnaissance de leur valeur dans une société donnée ;
  • la validation, qui est la confirmation par un organisme agréé que les acquis de l'apprentissage ou les compétences d'un individu ont été évalués par rapport à ses références en faisant appel à des méthodes d'évaluation prédéfinies ;
  • l'accréditation, qui est le processus par lequel un organisme agréé délivre des certifications (certificats, diplômes ou titres), accorde des équivalences, des unités de crédit ou des dispenses, ou émet des documents tels que des livrets de compétences, en s'appuyant sur une évaluation des acquis de l'apprentissage et/ou des compétences en fonction de finalités et de méthodes différentes. Dans certains cas, le terme « accréditation » s'applique à l'évaluation de la qualité d'un établissement ou d'un programme pris dans son ensemble.

Si l'UNESCO utilise le terme de RVA pour désigner la reconnaissance des compétences, il existe un large éventail d'appellations pour décrire les pratiques de reconnaissance et de validation selon les pays. Aux États-Unis d'Amérique, par exemple, la RVA est appelée « évaluation et reconnaissance des apprentissages antérieurs » (PLAR). Au Royaume-Uni, on utilise les termes d'« accréditation des apprentissages antérieurs » (APL) ou d'« accréditation des acquis de l'expérience » (APEL). Les autres termes les plus fréquemment utilisés sont la reconnaissance des apprentissages antérieurs (RPL) et la validation des apprentissages antérieurs (VPL).

Encadré 3.12. L'ATLV en pratique

Approche globale de la validation en France

En France, le système de validation des acquis de l'expérience (VAE) est entériné par la législation nationale et les décrets y afférents depuis 2002. Il s'agit d'un droit légal de l'individu disposant d'un cadre juridique clair. Ce système permet de reconnaître, valider et accréditer les résultats de l'apprentissage non formel et informel en offrant la possibilité d'une qualification à quiconque dispose d'un certain degré d'expérience n'ayant pas donné lieu à certification. Grâce au système de VAE, les expériences d'apprentissage obtenues dans divers contextes peuvent donc aboutir à l'obtention d'une certification totale ou partielle.

Les salariés ont ainsi légalement le droit de prendre un congé de formation en vue d'obtenir une reconnaissance dans le cadre du système de VAE, les employeurs pouvant également lancer une démarche de VAE collective pour des groupes d'employés. Ces processus s'appliquent aussi aux demandeurs d'emploi. La VAE française s'applique à de nombreux types de compétences, qu'elles soient professionnelles ou acquises dans l'enseignement général, y compris les qualifications délivrées ou accréditées par les ministères, et des qualifications sectorielles comme le certificat de qualification professionnelle (CQP).

Le système de VAE relie plus largement les individus au système éducatif et au marché du travail européens : les qualifications auxquelles il mène sont inscrites au Répertoire national des certifications professionnelles (RNCP) français et correspondent aux niveaux 3 à 8 du Cadre européen des certifications (CEC). La VAE est en outre largement considérée comme un système solide, car ses qualifications ont une valeur égale à celles obtenues dans les programmes formels d'enseignement et de formation professionnels. La procédure de validation est globale et comprend l'identification, la documentation et l'évaluation des acquis, suivies d'une certification officielle de l'apprentissage délivrée par un jury.

En 2017, plus de 307 000 certifications avaient été délivrées grâce à la VAE, qui permettait d'accéder à quelque 1 300 qualifications.

Source : Cedefop et al., 2017

La RVA est une étape cruciale vers la réalisation de l'apprentissage tout au long de la vie qui présente de nombreux avantages pour les apprenants. Son principe de base est qu'il est utile de donner de la visibilité à des acquis qui ne sont pas encore reconnus, entre autres parce que cela peut renforcer l'estime de soi des apprenants et les inciter à poursuivre leurs études, ce qui, à son tour, peut améliorer leur bien-être, ainsi que leur employabilité (UIL, 2012). La RVA peut également contribuer à l'intégration de plus larges pans de la population (par exemple, les personnes ayant quitté l'école prématurément et les travailleurs de l'économie informelle) dans un dispositif ouvert et flexible d'éducation et de formation, et donc contribuer à promouvoir des sociétés inclusives.

Pour mettre la RVA en pratique, les lignes directrices de l'UNESCO (UIL, ibid.) identifient six grandes interventions à l'échelon national : (1) faire de la RVA un volet essentiel de toute stratégie nationale d'apprentissage tout au long de la vie, (2) mettre en place des systèmes de RVA qui soient accessibles à tous, (3) faire de la RVA un élément à part entière des systèmes d'éducation et de formation, (4) créer une structure nationale de coordination impliquant toutes les parties prenantes, (5) renforcer les capacités du personnel en charge de la RVA, et (6) concevoir des mécanismes de financement durables. On trouve actuellement partout dans le monde des exemples des bonnes pratiques en matière de promotion de la RVA.

Si de nombreux pays ont commencé à élaborer des cadres et des mécanismes nationaux de RVA, leur mise en place aux niveaux national, régional et local est extrêmement variable. Pour fournir une vue d'ensemble des approches, des réglementations et des mécanismes de gouvernance concernant la RVA au niveau national, l'UIL a mis en place un observatoire mondial qui recueille des profils de pays (UIL, 2022a). Il est complété par une série d'études de cas provenant de différents secteurs, offrant ainsi un aperçu des pratiques et des défis en matière de RVA à travers le monde.

L'observatoire énumère divers facteurs d'influence, dont le contexte national et le degré d'engagement des organes gouvernementaux, des organisations du secteur privé et des individus. Il existe donc différentes formes de gouvernance selon le pays : on peut citer, entre autres, les modèles de partenariat social, les modèles multipartenaires ou la coordination de la RVA grâce au CNQ. Certains pays, comme la Norvège [1], ont créé des instituts nationaux sous l'égide de leurs ministères de l'éducation respectifs, qui coopèrent avec les syndicats, les entreprises, les établissements d'enseignement supérieur et autres. Ils sont chargés notamment d'élaborer des lignes directrices sur les processus de validation pour l'entrée dans l'enseignement professionnel post-secondaire et l'admission sur dispense dans l'enseignement supérieur. Ces dispositifs de gouvernance multiparties prenantes rappellent ceux mis en place pour élaborer les politiques d'ATLV (voir le chapitre 2).

Il est essentiel de relier entre eux les efforts de l'ensemble des parties prenantes et des autorités nationales pour permettre l'accès à l'éducation et la reconnaissance d'un large éventail de compétences. La RVA exige que les systèmes fonctionnent ensemble pour assurer la mobilité des apprenants entre les différents programmes associés à l'éducation, à la formation et au travail. Le renforcement de l'expertise et des capacités professionnelles des éducateurs, des évaluateurs, des conseillers et des administrateurs impliqués dans la RVA est une autre dimension importante pour garantir la qualité des processus et des procédures (Cooper et Ralphs, 2016).

Les services d'information, d'orientation et de conseil expliquent en quoi consistent les procédures de RVA et garantissent que ces possibilités sont effectivement utilisées par les apprenants. Ces structures de soutien leur présentent les pratiques et les avantages de la reconnaissance, ainsi que leur fonctionnement et la manière de s'y préparer. Ce soutien doit être facilement accessible à tous, en ligne et en face-à-face, et s'adresser en particulier aux groupes les plus défavorisés.

Le financement et la législation visant à encourager la RVA sont extrêmement variables d'un pays à l'autre. En France, par exemple, la reconnaissance des apprentissages antérieurs est un droit constitutionnel, ce qui garantit son financement de base. Dans d'autres contextes, la RVA est un mandat non financé des établissements, reposant sur des choix de subvention croisée. Si différents éléments de l'ATLV peuvent se prêter à un financement partagé par le biais de subventions privées et de partenariats publics, dans la plupart des contextes nationaux, l'allocation d'un véritable financement public est essentielle. La mise en place de mécanismes de RVA adéquatement financés et coordonnés exige une action politique et un travail de pédagogie et d'organisation dédiés de la part des champions et des défenseurs de l'apprentissage tout au long de la vie.

Encadré 3.13. L'ATLV en pratique

RVA en faveur des migrants et des réfugiés

La RVA des acquis de l'apprentissage non formel et informel est un élément essentiel de l'apprentissage tout au long de la vie. Singh (2018) souligne la valeur de la RVA pour les réfugiés, car c'est pour eux un « moyen de prendre leur destin en main, par exemple pour obtenir une certification, entrer dans la vie active ou échapper à la pauvreté et à l'exclusion sociale » (ibid., p. 13). Cependant, de nombreux systèmes de reconnaissance sont encore trop peu développés ou trop fragmentés pour pouvoir répondre aux besoins des migrants. Dans une enquête portant sur 13 pays européens, seule une minorité de migrants très instruits avaient fait une demande de reconnaissance : il se peut qu'ils ne puissent ou ne veuillent pas investir dans des processus complexes, longs et coûteux. En outre, les procédures et les agences officielles de RVA ne sont pas les mêmes selon que la profession est réglementée ou non. L'identification, la documentation, l'évaluation et la certification des aptitudes et des compétences relèvent de multiples services gouvernementaux et autorités sous-nationales. Les organismes de reconnaissance sont souvent déconnectés des organismes responsables de l'intégration et de l'emploi.

L'Allemagne a adopté en 2012 une loi fédérale visant à simplifier la reconnaissance des qualifications professionnelles. Les ressortissants étrangers peuvent désormais l'obtenir quel que soit leur statut de résidence et leur nationalité. Ils peuvent faire une demande légale de reconnaissance, la décision concernant la compatibilité des qualifications professionnelles obtenues à l'étranger avec les exigences professionnelles allemandes leur étant notifiée dans les trois mois.

Outre l'adoption de lois visant à améliorer les systèmes de RVA, les autorités nationales et régionales peuvent mettre en place des mesures visant à garantir que les organismes d'évaluation et d'accréditation et les établissements universitaires harmonisent leurs exigences et adhèrent aux meilleures pratiques. Au Canada, la province de l'Ontario a ainsi nommé en 2007 un « commissaire à l'équité », afin de garantir un accès équitable aux professions réglementées pour les personnes possédant des qualifications étrangères. Dans quatre pays accueillant des réfugiés syriens – l'Égypte, la Jordanie, le Liban et la Turquie –, des processus sont en cours pour l'élaboration de cadres nationaux de qualifications, afin d'assurer leur reconnaissance en fonction des résultats et des compétences obtenus dans toutes les modalités d'apprentissage, qu'elles soient formelles, non formelles ou informelles.

Sources : Singh, 2018 ; Lodigiani et Sarli, 2017 ; OCDE, 2014 ; Cedefop, 2016 ; Owen et Lowe, 2008

3.4.3. Les parcours d'apprentissage flexibles dans les stratégies de mise en œuvre de l'ATLV

Facilités par les CNQ et la RVA, les parcours d'apprentissage flexibles sont conçus pour offrir différentes options d'apprentissage aux communautés qui ont besoin d'acquérir des connaissances pertinentes, de faire reconnaître des expériences antérieures ou d'effectuer une transition vers ou entre les programmes au sein des différentes modalités d'apprentissage et d'une modalité à l'autre. La mise en place d'un système holistique de parcours flexibles pour assurer la continuité de l'apprentissage la vie durant est un effort complexe qui nécessite des réglementations nationales, un engagement des parties prenantes de l'éducation, de la formation et du travail, et des financements adéquats. Il est également essentiel, pour garantir l'efficacité des parcours d'apprentissage, de développer les capacités des personnels de la RVA et de prévoir des mécanismes d'assurance qualité et des services d'information et d'orientation accessibles aux apprenants. Le tableau 3.4 présente certains des aspects à prendre en compte lors de la conception d'une stratégie de mise en œuvre visant à promouvoir les parcours d'apprentissage flexibles.

Tableau 3.4. Critères clés concernant les stratégies de mise en œuvre de l'ATLV : parcours d'apprentissage flexibles

Cadres et mécanismes nationaux

  • Intégrer la RVA en tant que pilier clé dans la politique ou la stratégie nationale d'ATLV.
  • Mettre en place un CNQ et y rattacher les dispositifs de RVA.
  • Créer des organes de régulation et un point de coordination national pour la mise en œuvre des parcours flexibles (offre, promotion, assurance qualité, suivi).
  • Développer des approches destinées à accroître les interactions entre les établissements d'enseignement, les entreprises et le secteur de la société civile afin de traduire les apprentissages acquis dans les expériences de travail et de vie en crédits et/ou en qualifications.

Accessibilité et structures de soutien

  • Développer des procédures pour identifier, documenter, évaluer, valider et accréditer les résultats d'apprentissage, en particulier ceux acquis en dehors des établissements d'enseignement et de formation formels.
  • Utiliser à la fois l'évaluation formative (identification et documentation de la progression de l'apprentissage) et l'évaluation sommative (validation des acquis d'apprentissage menant à la qualification).
  • Offrir des services d'information, d'orientation et de conseil pour expliquer les procédures de RVA et les parcours d'apprentissage disponibles pour tous, accessibles en ligne et en face-à-face.
  • Fournir un soutien spécial par des dispositifs flexibles aux groupes défavorisés
  • Fournir un point d'entrée unique aux procédures et services de RVA afin de faciliter la coordination et la cohérence.

Implication des parties prenantes

  • S'assurer que toutes les parties prenantes ont des rôles et des responsabilités clairement définis lors de la conception, de la mise en œuvre et de l'assurance qualité du système de RVA.
  • Exposer les avantages des processus de RVA aux employeurs et aux prestataires d'éducation et de formation afin d'améliorer la transparence et l'acceptation.
  • Créer des partenariats multiparties prenantes entre les acteurs publics, privés et communautaires en vue de développer des mécanismes durables de partage des coûts.

Assurance qualité et développement des personnels

  • Mettre en place un système de formation pour le personnel de la RVA afin d'améliorer ses capacités à gérer et à conduire les processus d'évaluation et de validation dans leurs contextes socio-économiques spécifiques.
  • Mettre en place des mécanismes d'assurance qualité pour garantir que les outils et instruments d'évaluation sont pertinents, fiables et équitables.
  • Établir des processus administratifs efficaces pour la réception des candidatures, l'organisation des évaluations et le retour d'information sur leur issue, l'enregistrement des résultats, la délivrance des qualifications et la conception des procédures d'appel.

Mécanismes de financement

  • Fournir des ressources financières suffisantes pour la construction de l'infrastructure de base du système de RVA.
  • Établir une formule de financement durable aboutissant à une répartition équitable des coûts de financement de la mise en œuvre de la RVA entre l'État, les employeurs et les particuliers.
  • Prendre des dispositions spéciales pour que les groupes et les personnes vulnérables aient accès aux dispositifs de RVA à titre gratuit ou à tarif réduit.
  • Réaliser des analyses coûts-bénéfices afin de mettre en évidence les avantages de la RVA pour les individus, les entreprises, les établissements d'enseignement et la société dans son ensemble.

Sources : UIL, 2012 ; Bertelsmann Stiftung, 2019


[1] La direction de l'apprentissage tout au long de la vie est assurée au sein du Ministère norvégien de l'éducation et de la recherche par Kompetanse Norge (site en anglais : https://www.kompetansenorge.no/english/).

Establishing flexible learning pathways

Soumis par uil_maintainer le ven 04/11/2022 - 13:57

Bertelsmann Stiftung. n.d. ELLI Index in Brief. [PDF] Gütersloh, Germany. Available at: https://www.bertelsmann-stiftung.de/fileadmin/files/BSt/Presse/imported/downloads/xcms_bst_dms_32063_32087_2.pdf [Accessed 23 February 2022]. Bertelsmann Stiftung. n.d. ELLI Index in Brief. [PDF] Gütersloh, Germany. Available at: https://www.bertelsmann-stiftung.de/fileadmin/files/BSt/Presse/imported/downloads/xcms_bst_dms_32063_32087_2.pdf [Accessed 23 February 2022].

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